Pourquoi Alexandria Ocasio-Cortez est-elle si convaincante ?
VIDÉO. Les interventions de la jeune élue démocrate à la Chambre des Représentants deviennent régulièrement virales. Nous avons décrypté ses techniques de rhétorique.
Nous sommes en décembre dernier et Alexandria Ocasio-Cortez siège au Congrès américain depuis à peine un mois. Elle ne le sait pas encore, mais la démonstration qu’elle s’apprête à faire sur le financement de la politique aux Etats-Unis va devenir virale. Depuis, cette intervention où elle se met dans la peau d’un politicien corrompu s’est imposée comme la vidéo politique la plus regardée de Twitter, avec 41 millions de vues.
Alexandria Ocasio-Cortez a, de son côté, réitéré l’exercice sur plusieurs thématiques, comme la couverture maladie ou le manque de concurrence entre les sous-traitants de l’armée américaine. N’hésitant pas à jouer sur un registre plus didactique qu’un simple monologue (elle multiplie les questions), la jeune élue s’est fait remarquer pour sa maîtrise de la rhétorique.
La jeune élue privilégie les questions fermées. Quand elle demande si elle peut légalement faire telle ou telle chose en tant qu’élue, la réponse est soit oui, soit non. Et comme la réponse vient d’une experte, ça renvoie une image de vérité.
Une image de vérité
Grâce à cette dynamique de validation par un expert de chacune des étapes de son raisonnement, « AOC », comme on la surnomme, construit peu à peu une argumentation qui sera perçue comme plus objective.
Autre intervention remarquée qui en dit long sur les techniques de rhétoriques préférées de la benjamine du Congrès : son récit vibrant des conditions de vie dans les centres de rétention administrative à la frontière mexicaine.
Un réquisitoire contre la politique migratoire de l’administration Trump, devant laquelle elle a demandé à prêter serment, alors que ce n’est pas requis. « C’est une façon pour elle d’emmener le débat sur un terrain plus moral, d’affirmer qu’elle ne ment pas. ».
L’expérience personnelle
AOC aborde régulièrement des questions politiques par le prisme de l’expérience personnelle : ce qu’elle fait très bien, c’est de mettre à l’échelle de chaque individu, de chaque quotidien, les conséquences des grandes décisions politiques.
« Ces femmes sont séparées de leurs enfants devant le drapeau américain ! », s’émeut, sanglots dans la voix, l’élue de New York.
En bonne oratrice, la plus médiatique de la « squad », cette « bande des quatre » élues issues des minorités à qui Donald Trump à intimer de « rentrer chez elles », n’hésite pas à jouer sur l’émotion, un des « piliers » de l’art oratoire chez les Grecs.
Après le logos, la logique, il y a le pathos et l’éthos, c’est-à-dire l’image renvoyée par l’orateur. Jouer sur ce registre de l’émotion lui permet de renvoyer une image très puissante car on voit qu’elle connaît le dossier, mais aussi qu’elle en a une expérience, qu’elle est allée dans ces centres, qu’elle a vu ce qu’il s’y passait.